« Evelyn » d’Orlando Von Einsiedel
J’ai récemment décidé de changer le format de mes bilans. En effet, en commençant ce blog, j’ambitionnais de parler de mes coups de cœur et si j’aime l’idée de conserver une trace de tout ce que je consomme, je trouve que ce qui me plait vraiment reste trop souvent noyé dans la masse. C’est pourquoi je vous retrouve aujourd’hui pour vous parler d’un documentaire que j’ai regardé sur netflix. Je ne sais pas comment je suis tombée dessus (le hasard des suggestions, mais ça veut dire que je regarde vraiment des trucs assez glauques) ni pourquoi j’ai cliqué (thématique : le suicide…ah mais n’aurais-je pas un master en psycho ? ce doit être cela…), mais en tout car j’ai vraiment aimé et c’est pourquoi je lui dédie un article pour lui tout seul. ?
Evelyn Von Einsiedel (le frère du réalisateur donc) est un jeune homme d’une vingtaine d’années qui s’est ôté la vie il y a de cela une dizaine d’année. S’apercevant que les années passent et que la famille ne parvient toujours pas à exprimer ses émotions, Orlando, son frère et sa sœur, trentenaires, décident de partir pour une longue marche, notamment à travers l’Ecosse, dans des endroits que leur frère affectionnait. Au long de cette marche, ils seront accompagnés successivement par leur mère, puis leur père et leur belle-mère et enfin leurs meilleurs amis. Ils évoqueront leurs souvenirs, heureux et traumatiques, la mémoire de leur frère, ce qui les lie et ce qui les sépare… Ils auront également l’occasion d’interagir avec des étrangers au long du périple, qui les questionnent sur ce qu’ils sont en train de faire (puisqu’ils sont tout de même suivis par des caméras) et s’aperçoivent que beaucoup ont connu, de près ou de loin, une tragédie semblable. J’ai trouvé ce film intime (notamment grâce aux extraits de vidéos familiales du temps où tout allait bien) mais pas impudique, comme si cette famille nous faisait un cadeau. J’ai été extrêmement émue par l’émotion, mais aussi la poésie et la lumière qui se dégagent de cette œuvre brute. Elle a également le mérite de briser les tabous autour de la maladie mentale (Evelyn avait un diagnostic de schizophrénie), de montrer des hommes qui acceptent de montrer leurs émotions et leurs larmes et de rappeler que le deuil n’est pas un processus linéaire avec une ligne d’arrivée claire. A la fin, j’avais envie de leur faire à tous un énorme hug (ce que fait d’ailleurs un inconnu avec la sœur à un moment).
Si vous parlez/comprenez l’anglais, je vous partage ci-après un poème de Nicholas Evans que la fratrie lit à la fin du film…
If I be the First of us to Die
If I be the first of us to die,
Let grief not blacken long your sky.
Be bold yet modest in your grieving.
There is a change but not a leaving.
For just as death is part of life,
The dead live on forever in the living.
And all the gathered riches of our journey,
The moments shared, the mysteries explored,
The steady layering of intimacy stored,
The things that made us laugh or weep or sing,
The joy of sunlit snow or first unfurling of the spring,
The wordless language of look and touch,
The knowing,
Each giving and each taking,
These are not flowers that fade,
Nor trees that fall and crumble,
Nor are the stone,
For even stone cannot the wind and rain withstand
And mighty mountain peaks in time reduce to sand.
What we were, we are.
What we had, we have.
A conjoined past imperishably present.
So when you walk the wood where once we walked together
And scan in vain the dappled bank beside you for my shadow,
Or pause where we always did upon the hill to gaze across the land,
And spotting something, reach by habit for my hand,
And finding none, feel sorrow start to steal upon you,
Be still.
Close your eyes.
Breathe.
Listen for my footfall in your heart.
I am not gone but merely walk within you.
Je vous laisse avec l’envie, ou non de voir cette jolie œuvre/hommage.