« Kérozène » d’Adeline Dieudonné

Cela faisait des mois, voire des années que je me disais qu’il fallait que je lise Adeline Dieudonné, jeune autrice belge dont le premier roman « la vraie vie » a fait un carton. Je n’ai pas attaqué son premier roman, mais le deuxième « Kérozène » (pour info, elle vient d’en publier un troisième « reste »). Eh bien j’ai été agréablement surprise ! Dans le sens où cela m’a fait sortir de ce que je lis habituellement. Son roman, dont je vous insère la quatrième de couverture est constitué de courts chapitres consacrés chacun à un personnage (il y a même un cheval) qui vont se retrouver sur la même aire autoroute que les autres par une étouffante soirée d’été.

On est ici dans un roman choral sans l’être. Il n’y a pas de grande histoire qui les lie tous, mais plutôt une série de concours de circonstances absurdes, cocasses, cruels et parfois glauques… Ames sensibles s’abstenir, ou pas… Je ne suis pas fan du langage cru, mais ce mix à mi-chemin entre « striptease » (les belges comprendont) et Tarantino m’a au départ un peu choquée et finalement beaucoup fait rire, au point d’en lire des extraits à voix haute à mon amoureux (qui s’est demandé ce que je lisais, moi, fan de séries en costume). La plume d’Adeline Dieudonné m’a convaincue, j’ai dévoré ce roman et les deux autres vont certainement rejoindre ma pile à lire prochainement !

« Bournville »-« Le Royaume Désuni » de Jonathan Coe

En cette semaine post-couronnement, il est très opportunément question d’un de mes auteurs favoris, j’ai nommé Jonathan Coe, dont j’ai lu le dernier roman « Le Royaume désuni ». Je l’ai lu en anglais, langue dans laquelle il est intitulé « Bournville », du nom d’une ville, ou plutôt une cité-jardin,  entièrement construite par une communauté Quaker à la fin du 19° siècle pour abriter la fabrique de chocolat « Cadbury » et ses employés.

Le roman est structuré en un prologue et 7 chapitres qui suivent les personnages d’une même famille et leur entourage alors qu’ils vivent de près ou de loin les grands évènements de l’histoire anglaise de 1953 (couronnement d’Elizabeth) à mai 2020 (75° anniversaire de la libération) en passant par la victoire à la coupe du monde de 1966, disputée à domicile. Que dire ? Ce roman est à la fois une saga familiale, un récapitulatif historique, une réflexion sur l’identité anglaise et son rapport à l’Europe et à la Monarchie (des thèmes chers à Jonathan Coe et exploités dans presque chaque roman), une critique de la vie politique et diplomatique et une galerie de personnages savoureusement croqués, juste assez cocasses pour nous amuser et pouvoir rester totalement réalistes. On s’y retrouve baladé à toutes les époques, des rues de Londres, à la banlieue de Birmingham, sans oublier de faire un détour par le Pays de Galles. On y apprend également pourquoi le chocolat « Cadbury », emblématique de son pays, ne s’est jamais dégagé de marché outre-Manche (alors qu’il est très bon !). Et enfin, on y croise en caméo d’autres personnages de l’univers de Coe. Si ce roman ne fait pas partie de la saga de la famille Trotter (comme Le cercle fermé, Bienvenue au club et Le cœur de l’Angleterre), on y trouve des allusions à des membres de la famille et également un cross over avec « Expo 58 ». Cela m’a donné envie de relire tous ces romans dans l’ordre tant le souci du détail est poussé loin. Jonathan Coe adresse sans cesse des clins d’œil au lecteur et à ses personnages fétiches.

Comme vous l’aurez compris, j’ai adoré ce roman qui a fait vibrer mon cœur d’amatrice de culture britannique. Il m’a amusée et il m’a instruire. Il m’a émue et m’a donné envie de voyager et de lire encore davantage. Et, soyons francs, c’est déjà pas mal ! Vivement le prochain roman de Jonathan !

« Trio » de William Boyd

Bonjour à toustes, je vous reviens avec un roman anglais intitulé « Trio » de William Boyd. J’avais commencé ce livre en été. Je n’avais pas pu le finir et ce pour des raisons indépendantes de sa qualité. J’ai pris un risque avec lui, je l’ai repris là où je l’avais laissé, sans relire les 100 premières pages déjà lues. Défi relevé : je lui ai fait honneur en quelques jours et je n’ai globalement pas eu trop de mal à raccrocher à l’histoire.

Le trio dont il est question ici, n’est pas un trio amoureux, mais un trio de solitudes. Des personnages qui gravitent autour ou sont au centre d’une production cinématographique dans les années 60 : la femme du réalisateur qui se rêve écrivaine et se noie dans l’alcool, le producteur qui a toutes les peines du monde à ne pas se faire entuber par ses associés tout en se débattant avec son homosexualité longtemps refoulée et la jeune star américaine qui tente de tourner la page d’un mariage toxique et cherche l’amour et un second souffle en Angleterre. Ces personnages se croisent finalement assez peu, mais gravitent dans les mêmes cercles.

J’ai beaucoup aimé ce roman qui conjugue des qualités de narrations à des aspects qui me plaisent en tant que lectrice :

  • Les années 60 et le monde du cinéma et des artistes est dépaysant et donne envie de revoir ses classiques
  • Des personnages un peu pathétiques, énervants parfois, mais attachants la plupart du temps et qui vont tous trois devoir faire des choix et entrer en transformation au cours du roman, avec des issues diverses. Le monde intérieur de chacun est si bien développé qu’il est facile de se mettre dans leur peau
  • Une écriture dynamique pour former un tout cohérent
  • De jolies références et réflexions sur ce qu’est être acteur, écrivain, ou travailleur de l’ombre.
  • Du suspense car vraiment on ne sait pas comment chacun va se dépatouiller avec son sac de nœud
  • Une bonne dose d’humour et de situations cocasses sans être grotesques.

Si vous êtes sensibles à ce que j’énumère ici et que vous avez envie de quelque chose de bien écrit et typiquement british – du fond et un vrai questionnement existentiel avec ce qu’il faut de lumière et d’humour – je vous conseille vivement ce roman. Avez-vous déjà lu William Boyd ?

« Seule en sa demeure » de Cécile Coulon et le roman gothique en général

Dernièrement, j’avais envie de lire un auteur français, alors j’ai demandé à La Kube de m’aider. Je ne voulais pas un roman parisien, pas un roman nihiliste, mais une belle langue non traduite et j’ai reçu « Seule en sa demeure » de Cécile Coulon. Cécile Coulon a une biographie impressionnante pour ses 32 ans (8 romans publiés, un recueil de nouvelles, 4 recueils de poésie, un ouvrage jeunesse, une pièce de théâtre notamment) des cheveux blond polaire et elle est marathonienne !

A la réception, la couverture et la quatrième de couverture m’ont immédiatement fait penser à l’un de mes romans favoris, « Rebecca » de Daphné du Maurier (ma chronique de 2018 ici), un classique de la littérature dite gothique, paru en 1931. Je me suis dit que les similitudes étaient frappantes, mais qu’un ouvrage aussi encensé ne pouvait pas être une simple resucée. Et je n’ai pas été déçue. J’ai d’abord été désarçonnée. L’histoire se déroule au XIX siècle et est écrit à la manière des romans de l’époque. La langue est soutenue sans être lourde et on est immédiatement plongés dans l’ambiance de la famille d’Aimée puis au domaine de son époux, situé au cœur de la Forêt d’Or. L’atmosphère est lourde et enivrante, les descriptions finement ciselées. J’ai lu ce livre en trois jours, je pense que j’ai passé la moitié du temps sur les 100 premières pages mais les 200 suivantes (et dernières) ont couru sous mes yeux. Car une fois le décor planté, la qualité de l’écriture ne faiblit pas mais l’intensité du suspense ne cesse de croître. J’ai adoré ce livre, j’ai échafaudé des hypothèses (fausses) et, c’est certain, je lirai d’autres livres de cette autrice.

Pour ceux et celles qui se demanderaient ce qu’est un roman gothique (et pour moi celui-ci en est un très réussi), voici l’article de wikipedia. Mais en gros les caractéristiques du gothique (qui n’est pas forcément paranormal, même si des éléments d’horreur et de paranormal peuvent s’y retrouver, comme chez Edgar Allan Poe) sont :

  • Un lieu chargé d’une atmosphère inquiétante, voire une nature hostile, qui deviennent des personnages à part entière (la forêt d’Or et le domaine Marchère chez Cécile Coulon, le domaine de Manderley et les falaises de Cornouailles chez du Maurier par exemple)
  • Des personnages de jeune femme persécutée/malade ou prise au piège, de personnages empreints de religiosités, qui ont souffert, des bandits, des domestiques qui exercent une emprise, etc…
  • Des thèmes tels que le secret honteux qui hante les vivants, le surnaturel, les unions interdites, le pacte, la fuite impossible…

Voilà, j’espère vous avoir envie de découvrir ces auteurs d’autrefois (du Maurier et Poe) ou Cécile Coulon si vous voulez frissonner en sortant des sentiers battus du polar que nous connaissons tous et que je ne dédaignerai jamais. J’ai dans ma pile de livres à lire un autre roman qualifié de « gothique » et signé Alexandre Dumas. Je m’y lancerai bientôt. J’ai été très étonnée de découvrir qu’il s’était essayé au genre…

Chronique littéraire: « Un bûcher sous la neige » de Susan Fletcher

Aujourd’hui, je viens vous parler de mon dernier coup de cœur littéraire ou plutôt d’un coup de cœur tout simplement. Il est venu à moi dans une box kube. Si vous ne connaissez pas le concept, il s’agit d’un abonnement mensuel (on peut aussi le faire en one shot, en offrant une carte cadeau ou pour soi-même, il existe également des coffrets thématiques mais je vous conseille de visiter leur site) à une box qui comprend un livre, ainsi que des goodies et souvent un thé à découvrir et/où une gourmandise. Le livre est choisi par un libraire indépendant sur base d’envies de lectures (style recherché, auteurs favoris, derniers livres lus) renseignée auparavant. Vous pouvez aussi choisir de recevoir l’un des trois livres chroniqués chaque mois par les fondateurs de Kube. Pour ma première box, j’avais renseigné des envies et j’ai donc reçu un roman qui se passe en Ecosse au XVII siècle.

Je vous laisse lire la quatrième de couverture : « Au cœur de l’Ecosse du XVII siècle, Corrag, jeune fille accusée de sorcellerie, attend le bûcher. Dans le clair-obscur d’une prison putride, le révérend Charles Leslie, venu d’Irlande, l’interroge sur les massacres dont elle a été témoin. Depuis sa geôle, la voix de Corrag s’élève au-dessus des légendes de sorcières et raconte les Highlands enneigés, les cascades où elle lave sa peau poussiéreuse. Jour après jour, la créature maudite s’efface. Et du coin de sa cellule émane une lumière, une grâce, qui vient semer le trouble dans l’esprit de Charles »

J’ai d’abord été dubitative face à ce roman parlant de solitude et d’une époque tellement révolue, mais finalement, j’ai été happée en quelques pages par le personnage de Corrag, jeune femme au cœur pur condamnée pour sa différence, l’écriture parfois lyrique de Susan Fletcher et l’atmosphère générale du roman. Les chapitres alternent entre la longue « confession » de Corrag, de sa fuite depuis l’Angleterre à son témoignage à propos du massacre du clan Mc Donald, et les lettres écrites par le révérend Leslie à sa femme, empreinte au fil du temps de plus en plus d’empathie envers la soi-disant sorcière.

Ce roman m’a plu car il mêle un côté historique (le contexte politique de l’écosse est brièvement résumé en fin d’ouvrage et permet de s’y retrouver) et un autre très contemplatif. Corrag fait à certains moments quasi corps avec la nature et certains passages sont d’une beauté bouleversante. Je ne me suis pas du tout ennuyée malgré les longs passages descriptifs qui nous transportent vraiment dans un autre temps et d’autres lieux et aident à comprendre qui est Corrag. Ce roman est aussi un hymne à la tolérance face à la différence, à ces gens en marge, que nous ne comprenons pas, qui sont pourvus d’une sensibilité différente. Bref, si vous aimez l’Ecosse, que vous êtes fan d’Outlander, que vous chercher un roman hivernal avec un personnage féminin dont la fragilité est toute la force et que vous êtes sensibles à la nature, ce roman est fait pour vous. Il me tarde maintenant de découvrir davantage de romans de Susan Fletcher et je remercie Kube et Manon G. , la libraire au nez fin qui a choisi un livre parfait pour moi.

Bilan culturel de mai

Les beaux jours sont enfin arrivés, les possibilités de sorties aussi et, malheureusement, le surcroit de travail (espérons que ce dernier soit temporaire). J’ai donc déserté mon blog près d’un mois. Voici mon bilan du mois de mai alors que juin est déjà bien entamé.

Le premier mai, le cinéma de ma ville participait à l’opération « Still Standing for Culture » et a ouvert illégalement ses portes le temps d’une journée. J’y suis allée, respectant strictement les consignes (et, surprise, personne n’est contaminé dans les cinémas et les théâtres chaque fois qu’on fait un test) et j’ai vu « Drunk » de Thomas Vinterberg. Une claque, j’ai adoré, c’est pourquoi je vous conseille de courir le voir à présent que les cinémas sont rouverts en France et en Belgique et qu’il est programmé un peu partout. De mon côté, je lui consacrerai dans les prochains jours un article rien que pour lui. Parce qu’il le vaut bien.

Au niveau des séries, j’ai terminé « Murder » qui m’aura bien accrochée et accompagnée en soirée durant deux mois (90 épisodes tout de même). Il faut reconnaitre que la série est addictive, les comédiens, Viola Davis en tête, sont excellent et les scénaristes ont une imagination inépuisable et sont de véritables architectes/mécaniciens du suspense et des retournements de situation. Reste que ça devient de plus en plus tiré par les cheveux, ils sont dans des situations inextricables et le grand nettoyage/déballage final m’a à la fois déçue et laissée de marbre tant c’était devenu too much.  

J’ai regardé « Leonardo » en italien sur raiuno. Il s’agit d’une co production européenne (qui devrait donc bientôt débarquer sur les chaines françaises et belges) qui met en scène Leonardo da Vinci aux prises avec des accusations de meurtre sur une de ses amies. Ces accusations n’ont jamais existé et on ne peut pas dire que le suspense soit insoutenable donc, mais le reste est assez bien respecté : les différents voyages et commissions de Leonardo, la genèse de La Cène et de La Joconde y sont abordés. Et puis une belle brochette d’acteurs là aussi, Aidan Turner (mon chouchou de Poldark) en tête.

J’ai enfin regardé la saison 2 de « qui a tué Sara ? » et disons que m’entrainer l’oreille à l’espagnol est le plus grand bienfait de cette série par ailleurs d’assez mauvaise facture. Et je pense qu’une saison trois va nous être infligée mais que j’y réfléchirai à deux fois.

Au niveau littérature, j’ai désormais une belle pile de livres à lire. J’en ai demandé et reçu pas mal pour mon anniversaire. Suite à une critique lue en ligne, j’ai commencé à lire « Le Cherokee » de Richard Morgiève. Voici ce qu’en dit le résumé : 1954, USA : alors qu ‘il fait sa tournée de nuit à la première neige, sur les hauts plateaux désertiques du comté de Garfield, dans l’Utah, le shérif Nick Corey découvre une voiture abandonnée. Au même moment, il voit atterrir un chasseur Sabre, sans aucune lumière. Et sans pilote. C’est le branle-bas de combat. L’armée et le FBI sont sur les dents. Quant à Corey, il se retrouve confronté à son propre passé : le tueur en série qui a assassiné ses parents et gâché sa vie réapparaît. Corey se lance à sa poursuite. Mais les cauchemars ont la dent dure… Et on peut tomber amoureux d’un agent du FBI. Je ne suis pas allée au bout. Ce bouquin est vraiment étrange. En allant lire sur internet, j’ai compris qu’il y avait deux sortes de personnes : ceux qui l’érigent au rang de roman culte et ceux qui abandonnent en cours de route. Il est je pense truffé de références que je ne maitrise pas et le style m’a perdue… Il a reçu plusieurs prix donc j’imagine que c’est à chacun de se faire une idée. Pas pour moi en tout cas.

Plus léger, j’ai lu « Cœurs brisés, jambes cassées » de Maria Ernestam dont j’avais déjà lu « les oreilles de Buster » (chroniqué ici). J’ai apprécié ce livre qui est pour moi un roman de Noël (oui la saison est mal choisie mais je l’avais sous la main lorsque j’ai abandonné le Cherokee) sympathique mais où je n’ai pas retrouvé la causticité et la fêlure que j’avais fini par apprécié dans les oreilles de Buster. Néanmoins, la lecture fut plaisante et légère. Elle l’aurait encore plus été en période de fêtes sous un plaid avec un bon thé.

Voilà, c’est tout pour ce bilan printanier. Je n’ai pas vécu de grands transports comme vous pouvez le constater, le génialissime « Drunk » mis à part. Mais les vacances, les livres en attente et les cinémas ouverts vont sans doute rentre l’été plus intense à bien des niveaux.

« Evelyn » d’Orlando Von Einsiedel

J’ai récemment décidé de changer le format de mes bilans. En effet, en commençant ce blog, j’ambitionnais de parler de mes coups de cœur et si j’aime l’idée de conserver une trace de tout ce que je consomme, je trouve que ce qui me plait vraiment reste trop souvent noyé dans la masse. C’est pourquoi je vous retrouve aujourd’hui pour vous parler d’un documentaire que j’ai regardé sur netflix. Je ne sais pas comment je suis tombée dessus (le hasard des suggestions, mais ça veut dire que je regarde vraiment des trucs assez glauques) ni pourquoi j’ai cliqué (thématique : le suicide…ah mais n’aurais-je pas un master en psycho ? ce doit être cela…), mais en tout car j’ai vraiment aimé et c’est pourquoi je lui dédie un article pour lui tout seul. ?

Evelyn Von Einsiedel (le frère du réalisateur donc) est un jeune homme d’une vingtaine d’années qui s’est ôté la vie il y a de cela une dizaine d’année. S’apercevant que les années passent et que la famille ne parvient toujours pas à exprimer ses émotions, Orlando, son frère et sa sœur, trentenaires, décident de partir pour une longue marche, notamment à travers l’Ecosse, dans des endroits que leur frère affectionnait. Au long de cette marche, ils seront accompagnés successivement par leur mère, puis leur père et leur belle-mère et enfin leurs meilleurs amis. Ils évoqueront leurs souvenirs, heureux et traumatiques, la mémoire de leur frère, ce qui les lie et ce qui les sépare… Ils auront également l’occasion d’interagir avec des étrangers au long du périple, qui les questionnent sur ce qu’ils sont en train de faire (puisqu’ils sont tout de même suivis par des caméras) et s’aperçoivent que beaucoup ont connu, de près ou de loin, une tragédie semblable. J’ai trouvé ce film intime (notamment grâce aux extraits de vidéos familiales du temps où tout allait bien) mais pas impudique, comme si cette famille nous faisait un cadeau. J’ai été extrêmement émue par l’émotion, mais aussi la poésie et la lumière qui se dégagent de cette œuvre brute. Elle a également le mérite de briser les tabous autour de la maladie mentale (Evelyn avait un diagnostic de schizophrénie), de montrer des hommes qui acceptent de montrer leurs émotions et leurs larmes et de rappeler que le deuil n’est pas un processus linéaire avec une ligne d’arrivée claire. A la fin, j’avais envie de leur faire à tous un énorme hug (ce que fait d’ailleurs un inconnu avec la sœur à un moment).

Si vous parlez/comprenez l’anglais, je vous partage ci-après un poème de Nicholas Evans que la fratrie lit à la fin du film…

If I be the First of us to Die

If I be the first of us to die,
Let grief not blacken long your sky.
Be bold yet modest in your grieving.
There is a change but not a leaving.
For just as death is part of life,
The dead live on forever in the living.
And all the gathered riches of our journey,
The moments shared, the mysteries explored,
The steady layering of intimacy stored,
The things that made us laugh or weep or sing,
The joy of sunlit snow or first unfurling of the spring,
The wordless language of look and touch,
The knowing,
Each giving and each taking,
These are not flowers that fade,
Nor trees that fall and crumble,
Nor are the stone,
For even stone cannot the wind and rain withstand
And mighty mountain peaks in time reduce to sand.
What we were, we are.
What we had, we have.
A conjoined past imperishably present.
So when you walk the wood where once we walked together
And scan in vain the dappled bank beside you for my shadow,
Or pause where we always did upon the hill to gaze across the land,
And spotting something, reach by habit for my hand,
And finding none, feel sorrow start to steal upon you,
Be still.
Close your eyes.
Breathe.
Listen for my footfall in your heart.
I am not gone but merely walk within you.

Je vous laisse avec l’envie, ou non de voir cette jolie œuvre/hommage.