Anxiété

L’anxiété est une vieille compagne de route pour moi. Dès l’enfance, je l’ai sentie planer, comme une mauvaise fée qui se serait penchée sur mon berceau. Elle circule dans la famille et parmi les belles choses qui m’ont été léguées, elle figure avec sa moche dégaine et m’a souvent gâché de beaux moments, voire des relations. Elle me susurre à l’oreille des croyances vénéneuses déguisées en vérité. Des mensonges qui me conduisent à me sous estimer, à me faire endosser la casquette de metteuse en scène de scénarii catastrophe et à éviter toutes sortes de dangers imaginaires. Elle s’est déjà manifestée sans que je m’y attende, un matin d’été au réveil. Elle s’invite lorsque je tiens à quelqu’un ou quelque chose que j’ai peur de perdre. Comme je crains de la voir surgir, je la provoque parfois et elle ne manque pas d’apparaitre avec son cortège de pensées paralysantes et dévalorisantes. J’aimerais penser que je l’ai vaincue pour de bon, mais d’outre tombe elle me commande de ne pas être si présomptueuse. Et pourtant, je finis toujours par gagner. Bien sûr j’y perds des plumes, bien sûr certaines cicatrices sont douloureuses, mais je ne renie pas les apprentissages que je tire de ces croisades. Cette année, avec le confinement, j’ai eu l’occasion de beaucoup réfléchir et de me sentir « alignée », pleinement consciente de qui je suis, de ce que je veux et de comment y parvenir. Puis, le monde extérieur, un monde extérieur aux apparences trompeuses et chargé d’une menace nouvelle, a rouvert ses portes et tout cela a vacillé à nouveau. Une nuit, ma vieille ennemie m’a rendu visite. J’ai senti la chambre tourner à nouveau. J’ai eu la tentation de fuir, de me reconfiner en moi-même. Et puis je me suis levée. J’avais à faire, quelqu’un avait besoin de moi et je me devais d’honorer mon engagement envers cette personne et envers moi-même. Envers la femme que je suis devenue, envers la professionnelle fiable et solide que je suis. Depuis, le chemin se poursuit et plus de visite surprise. Pourtant, rien n’est plus facile qu’avant. Pourtant ma tanière est confortable et me fait de l’œil. Mais j’ai décidé de grandir encore, d’éclore un peu plus chaque jour, de prendre le risque de tomber en sachant que j’ai les épaules pour me relever (et surtout les jambes) et que, si je tends la main, il y a fort à parier que quelqu’un la saisira.

Belgique, 29 juillet 2020

Estate

J’aime pas l’été. Oui je sais c’est pas commun, c’est rabat joie, mais c’est comme ça. J’aime pas l’été, ses langueurs et sa moiteur me ramènent à trop d’émotions inconfortables. D’étés passés à me questionner seule sur mon avenir sans réussir à le dessiner. D’étés passés sous la pluie du nord. D’étés de solitude et de ralenti, alors que j’ai besoin de structure et de ne pas laisser mes pensées vagabondes s’aventurer trop loin, au pays des « et si ? ». D’attaques de panique à 6h du matin dans une chambre surchauffée. Certains n’aiment pas Noël, cette pression à être heureux. Mon Noël dure deux mois. J’aime pas l’été car il me donne le temps de trop penser. J’aime pas l’été où les initiatives sont en suspens. J’aime pas l’été et je ne comprends pas pourquoi… Je suis pourtant une fille du sud, je supporte bien la chaleur, je prône le ralentissement collectif. Je suis contradictoire, c’est ainsi.

J’aime quand-même certaines choses. J’aime être à l’étranger, mais cette année pas fort possible. Ca joue sans doute sur mon moral, l’été dernier a été si fabuleux. J’aime marcher le soir dans les rues lorsqu’il fait encore chaud. J’aime la glace bien sûr. J’aime me plonger dans un bon roman et ne pas devoir le lâcher pour courir. J’aime surtout la pensée que l’automne s’en vient et que je vais renaître…

 

Bilan culturel de juillet

Bonjour à vous, confinés, déconfinés, surchauffés ou non,

J’ai du mal à écrire pour l’instant et pourtant, j’ai énormément de choses qui me trottent en tête. Alors que la canicule sévit sur la Belgique, il m’est difficile de trouver le moment et l’endroit propice pour ouvrir mon ordinateur et déplier ma pensée. Néanmoins, je tâche de garder le rythme de mes bilans culturels. Voici donc celui de juillet.

En ce mois de juillet tout d’abord, je me suis remise à écouter beaucoup de musique, je n’ai pas spécialement fait de découvertes, mais j’ai réécouté, pêle mêle Heather Nova, Kate Bush, Jovanotti, Lucio Battisti, David Bowie et Jacques Brel, entre autres. Je me laisse aussi surprendre par les daily mix que Spotify me propose. Il s’agit de compilations thématiques composées de chansons et d’artistes similaires à celles que j’ai l’habitude d’écouter sur la plateforme. Moi qui suis abonnée aux radios qui diffusent de la musique des années 60-70-80-90 et principalement du rock, cela me fait découvrir d’autres facettes de certains artistes et de nouvelles choses. Cela brasse énormément de souvenirs aussi, c’est dingue à quel point je peux associer des moments et des ambiances précises à un grand nombre de chansons. Notamment ce que j’écoutais entre mes 15 et mes 25 ans.

J’ai lu deux romans en ce mois de juillet. Le premier est « de l’influence de David Bowie sur la destinée des jeunes filles » de Jean-Michel Guénassia. J’ai été séduite par le titre et par l’excellente réputation dont jouit un autre roman de Guénassia, que je n’ai pourtant par lu (« Le club des incorrigibles optimistes »). Ce roman, qui ne parle pas vraiment de David Bowie, dissipons tout de suite un possible malentendu, nous plonge dans la peau de Paul, 17 ans. Paul est androgyne et, bien que sa mère lesbienne le rêve homosexuel, il aime les filles. Au cours du roman, il sera amené à trouver et affirmer son identité, mais également à dévoiler le mystère qui entoure sa naissance, sa mère ayant toujours refusé de lui dire qui était son père. Les thèmes abordés sont donc bien sérieux, mais le ton du roman est un peu…comment dire…nonchalant et cocasse ? Je ne sais pas comment mieux le définir. Paul est un peu nonchalant, il n’a pas beaucoup de chance, est un peu foireux aussi, mais il est touchant et on se prend au jeu. Ceci dit, cette approche crée chez moi une distance qui ne me permet pas vraiment d’être en empathie avec le personnage. Ce n’est pas forcément un défaut, mais il est vrai que j’aime ça. Il se passe pas mal de choses et la galerie de personnages est intéressante et haute en couleurs. J’ai vraiment ressenti l’atmosphère décrite, celle des clubs parisiens et du resto où Paul joue du piano. Oui parce qu’il n’est pas tellement question de Bowie (un peu quand même mais je ne dévoilerai rien), mais quand même beaucoup de musique.

Le second roman que j’ai lu est « Lignes de faille » d’une de mes autrices favorite, Nancy Huston, que j’ai eu le plaisir d’écouter en conférence en décembre dernier. Ce roman est divisé en 4 parties, chacune dévolue à un enfant de six ans et chaque enfant étant l’enfant du personnage dont on parle par la suite. Ce n’est peut-être pas très clair, disons qu’on remonte dans le temps et que le premier enfant est l’arrière petit fils du quatrième. On n’entend parler de cet enfant que comme un enfant mais il y parle de son père, sa grand-mère et son arrière grand-mère, eux-mêmes parents et enfants dans les chapitres qui suivent. Ils rajeunissent à mesure que le roman avance et c’est un procédé assez original car aux interrogations des enfants succèdent les éléments de compréhension qu’on retrouve dans la jeunesse de leurs ascendants, le principal mystère résidant dans l’enfance de l’arrière grand-mère, élevée en Allemagne puis envoyée au Canada. J’y ai appris des pans de l’histoire et du nazisme que j’ignorais, notamment les « fontaines de vie ». Néanmoins, ce roman n’est pas mon favori de Nancy Huston, même si les thèmes abordés me touchent toujours beaucoup, et si les procédés narratifs sont surprenants.

Au rayon séries, j’ai poursuivi dans la veine scandinave, puisque j’ai continué à regarder Bron la série suédo-danoise et que j’ai retrouvé avec plaisir la deuxième saison de Deadwind, la finlandaise. Je vous les recommande si vous êtes amateurs de polar scandinaves. Les duos d’enquêteurs sont vraiment sympas, au sens atypique et torturé du terme.

Enfin, j’ai pris le temps de regader un film (comme il me tarde de pouvoir retourner dans les salles obscures et fraiches) « Confident Royal » de Stephen Frears. Ce film nous dépeint la relation d’amitié inattendue entre la reine Victoria (l’impeccable Judi Dench), vieillissante et inconsolable après la mort de son mari, et son serviteur indien Muhammed Abdul Karim. C’est un film qui n’est pas dépourvu d’humour, l’entourage de sa majesté étant assez décontenancé par cette affection soudaine, mais aussi assez triste. Je connaissais cette relation, mais j’ai eu beaucoup de plaisir à la voir portée à l’écran.

Voilà, c’est tout pour ce mois-ci. A présent que les températures déclinent et que mes vacances approchent, j’espère pouvoir alimenter mon blog plus régulièrement. Ecrire me manque, mais qu’il est dur de prendre des initiatives après de longues journées de boulot par 35 degrés…