Le thème du jour 6 (comme je l’ai dit, si je ne me sens pas inspirée, je passe au suivant) sur discover est « main »…
Il y a tant de choses à faire avec ses mains et tant de choses à dire aussi. La main qui caresse, qui parle, qui saisit, qui donne, qui retient, qui violente aussi. La main qui nettoie, qui fabrique, qui fait et qui défait… Cette main qu’actuellement on doit ganter, on ne peut plus porter à son visage. Cette main devenue suspecte, vecteur de contagion, étangère, ennemie. Cette main de l’ami que nous ne pouvons plus prendre, cette main consolatrice que nous ne pouvons plus poser sur aucune épaule, cette main que nous ne pouvons plus serrer. S’il y a bien une part sociale en nous, après l’évidence du visage, c’est la main. Ne dit-on pas « donner un coup de main » ou « demander sa main à quelqu’un » ?
Je suis grande et j’ai de petites mains. Je n’ai pas de longs doigts de pianiste. Durant longtemps, j’ai délaissé et négligé mes mains, me définissant comme quelqu’un de cérébral. Il y a les manuels et les intellectuels et je me considérais de la seconde catégorie, comme inconsciente de la porosité de la frontière entre les deux. Les arts auxquels je m’adonne sont ceux de la parole, écrite ou parlée. Quand je faisais de la danse, et plus tard du théâtre, elles ont souvent été des accessoires inutiles que l’on me reprochait de ne pas savoir où mettre. Elles trahissaient alors mon stress, mon manque de maîtrise de mon corps, j’avais l’impression qu’on pouvait voir en direct mon cerveau se demander ce qu’il devait en faire. Maintenant cela va mieux, j’ai travaillé, j’ai grandi, j’ai pris confiance en moi, je sais m’exprimer aussi grâce à elles.
Je me suis engagée dans des études et dans un métier qui ne requiert pas d’utilisation particulière de mes mains. Je me suis engagée dans des hobbys et dans un sport qui ne demandent pas d’en être particulièrement habile. Ce n’est que récemment, il y a quelques années, qu’après m’être perdue trop profondément dans mes pensées, après avoir parfois perdu contact avec le sol et la matière tangible, que j’y suis revenue. J’y reviens également suite à mon intérêt pour l’écologie et le minimalisme. J’apprends doucement à réparer, à fabriquer, à détourner. Je me suis mise à la couture, timidement. J’aspire maintenant à broder et tricoter. L’âge aussi peut-être. Mes mains peuvent me servir à accomplir, à travailler, mais également à méditer, à concentrer mes pensées sur des tâches nouvelles qui requièrent toute mon attention, à des savoirs faire nobles et ancestraux.
Mes mains peuvent me reconnecter à la nature. En ces temps où le contact physique n’est pas permis, je me suis surprise à effleurer la pierre, à apposer mes paumes sur les troncs des arbres, à en épouser les aspérités. J’ai envie d’escalader la roche, de prendre une poignée de sable fin, de fermer la main et de le sentir s’écouler entre mes doigts. Je n’ai pas la main verte, mais j’ai envie d’un jour plonger les mains dans la terre et faire grandir un rosier. J’ai envie d’un massage des mains…l’avez-vous déjà essayé ? C’est absolument divin.
En attendant de pouvoir leur proposer de nouvelles activités, je les laisse s’adonner au coloriage, je les hydrate, je les vernis, elles tournent les pages de mes livres, elles tapotent ce clavier et permettent à mes mots de s’écouler, elles applaudissent tous les soirs à 20h… Je me réjouis de les laisser à nouveau être le prolongement de la tendresse de mon cœur en les tendant pour aider l’autre, mais surtout pour toucher et caresser les êtres qui me sont chers…
Mon dieu comme c’est beau ❤️😘
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